« A Silent Voice » Yoshitoki Oima

A Silent Voice
Yoshitoki Oima
Trad. du japonais par Géraldine Oudin
Ki-oon, « Shonen », 2015
7 tomes

sv1-oyDifficile de s’intégrer lorsqu’on est nouvelle à l’école primaire. Encore plus lorsqu’on est sourde de naissance. Shoko essaie de communiquer avec ses nouveaux camarades. Mais elle est persécutée par Shoya, jeune garçon frondeur. Ils se retrouvent plusieurs années plus tard.

Il est communément admis que les bibliothécaires sont de grands prescripteurs. La vérité, c’est que ça va également dans l’autre sens. Je dois vous confesser quelque chose. Il y a une jeune ado dans ma bibliothèque qui réserve des mangas en masse. Systématiquement, je puise dans ses lectures quand je ne sais plus quoi lire. Voilà comment je découvre A Silent Voice (entre autres).

sv4-oyCe manga aux apparences mignonnes et légères cache en réalité de vraies thématiques sérieuses. La cruauté de la société nipponne est souvent mise en valeur dans les mangas. La dureté de la vie lorsqu’on devient paria malgré soi est généralement un moment pivot pour justifier de la transformation des personnages que ce soit dans les histoires réalistes ou fantastiques. Shoko est handicapée. Cette incapacité lui donne du mal à s’intégrer. Les persécutions — en japonais : ijime — qu’elle subit sont des réactions attendues à sa différence, et elle doit apprendre à s’en protéger. Cependant, rien ne préparait Shoya, la petite teigne de l’école, à être complètement mis à l’écart du groupe dont il était le leader comme de tout le reste de la classe. Encore pire, que cette histoire le poursuivrait au collège et au lycée. Après plusieurs années à être totalement ignoré, son estime de soi parfaitement annihilée, il cherche à se racheter, tout en se préparant à commettre un acte irréparable.

Évidemment, des thématiques adolescentes ressortent. Qu’est-ce qui fait qu’on est le plus suivi, le plus aimé d’un groupe? Le pouvoir de nuisance? Les bonnes notes? La gentillesse? La méchanceté gratuite? Chacun prend des risques en choisissant sa voie. Le retour de bâton est dur. Le groupe est impitoyable. Shoya ne veut même plus les voir, il s’imagine une croix sur chacun de leurs visages, il les efface de sa vie. Pourtant, en essayant de renouer avec Shoko, les croix tombent. Des amitiés naissent. Les tensions demeurent au milieu de moments de joie. Shoya, personnage auquel on a bien du mal à apprécier au début, tisse même des liens très proches avec Shoko. Les relations entre filles et garçons, c’est compliqué… Mais alors, avec le handicap en plus! N’en parlons pas.

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Enfin, si justement parlons-en. C’est un des éléments qui m’a fait lire ce manga. La surdité est finalement un thème rarement abordé. Très souvent, on pense aux difficultés d’insertion à l’extérieur, mais on néglige l’intime. Chez Shoko, tout n’est pas simple. Sa mère persiste dans le déni, élève seule ses deux filles après que son mari l’ait quittée et refuse de signer avec sa fille. La soeur de Shoko, surprotectrice, se fait passer pour un garçon pour la défendre des brimades. Enfin, la langue des signes en dessin peut être tout à fait incroyable! Verbaliser sa colère avec les mains sans frapper, c’est quelque chose à voir. Je me demande cela dit si le dessin a été adapté par rapport à la langue des signes françaises, ce qui avait été le cas de la bande-dessinée sur Helen Keller.

Un manga sérieux, touchant, très crédible sur lequel il faut forcément jeter quelques yeux.

On aime, on n’aime pas? Allez donc voir par là
Nautiljon
BD Gest
Journal du Japon

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